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MENARD Benjamin

L’anormalité en droit de la responsabilité civile

Publié le 19 décembre 2016 Mis à jour le 20 décembre 2018

Thèse en Droit mention droit privé, soutenue le 14 novembre 2016.

Parce qu’elle est une clé de compréhension du déclenchement de la responsabilité civile, l’anormalité est une notion centrale de l’institution. Elle s’identifie d’abord à travers le dommage, qui est une anomalie, une déviation par rapport au cours normal des choses. L’anormalité est ici intrinsèque au dommage et se définit comme le déséquilibre patrimonial et extrapatrimonial subi par la victime. La notion se découvre ensuite à l’extérieur du dommage, elle caractérise ce qu’il faut en plus du dommage pour engager une responsabilité. Cette anormalité, dite extrinsèque au dommage, tient son origine dans la faute civile : est en faute l’individu ayant adopté un comportement anormal.
Classiquement cantonnée à l’élément objectif de la faute, avant qu’elle n’en épuise entièrement la définition, l’évolution montre que l’anormalité s’est diversifiée pour devenir un critère aux multiples visages. La notion se rencontre ainsi, par exemple, dans la responsabilité du fait des choses (anormalité de la chose), dans la responsabilité du fait d’autrui (anormalité du fait d’autrui) ou encore en matière de trouble du voisinage. De manière plus latente, l’anormalité peut également être mobilisée pour expliquer le risque sélectionné par le législateur pour faire l’objet d’un régime spécial (ex : accidents de la circulation, fait des produits défectueux). En définitive, l’anormalité est un critère juridique de discrimination qui peut, pour faire naître une obligation de réparation, être associé au fait générateur, au dommage ou au risque. Cette vision est forte de potentialités ; elle permet une présentation renouvelée de la matière autour des trois fondements que sont l’anormalité du fait générateur, l’anormalité du dommage et l’anormalité du risque. En délimitant le périmètre de la responsabilité civile, cette tripartition permet finalement une relecture de la matière à la lumière des trois fondements proposés.

Because it is key in understanding how it is triggered, the concept of abnormality is a notion of great importance in relation to civil liability. This concept is first of all found in relation to the notion of injury, which is an anomaly, a deviation from the normal course of things. The abnormality is an intrinsic part of an injury and is defined as a patrimonial and non-patrimonial disturbance suffered by a victim. The concept is then applied outside of the notion of injury, as it then characterises the elements additional to the injury that are needed in order for liability to arise. This aspect of the abnormality, the extrinsic side, originates from the tort principle: that one is liable for one’s own abnormal behaviour.
Although classically confined to the objective element of fault, the notion of abnormality has outgrown its original definition and developed into a criterion with many applications. The concept is used, for instance, in relation to product liability (abnormality of an object/product), vicarious liability, or even in relation to nuisance neighbours. There is perhaps also a latent possibility for the concept of abnormality to be used by the legislator for derivative special liability regimes (e.g. defective products, traffic accidents). Ultimately, the concept of abnormality is a form of legal criterion that, in order to give rise to compensation, can be associated to a triggering event, an injury, or a risk. This vision opens up many possibilities: it enables a new way of presenting this subject matter around the three principles that are the abnormality of the triggering event, the abnormality of the injury and the abnormality of the risk. By defining the perimeter of civil liability, this tripartition actually enables a new understanding of the subject matter through these three proposed principles.

Mots-Clés : abus de droit ; anormalité ; atteinte à un droit subjectif ; atteinte à l’image des biens ; causalité ; déséquilibre ; dommage anormal ; faute civile ; illicite ; imputation ; norme juridique ; norme extrajuridique ; régimes spéciaux de responsabilité ; responsabilité du fait des choses ; responsabilité du fait d’autrui ; risque anormal ; standard juridique ; troubles anormaux du voisinage.

Keywords : Abuse of rights ; abnormality ; harming a subjective right ; harming the image of goods ; causality ; imbalance ; abnormal injury ; civil liability ; illicit ; imputation ; legal norm ; non-legal norm ; special liability regime ; product liability ; vicarious liability ; abnormal risk ; legal standard ; nuisance neighbours.

Directrice de thèse : Stéphanie PORCHY-SIMON

Membres du jury :
- Mireille BACACHE, Rapporteur, Professeure des universités, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne,
- Olivier GOUT, Professeur des universités, Université Jean Moulin Lyon 3,
- Patrice JOURDAIN, Professeur des universités, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne,
- Fabrice LEDUC, Rapporteur, Professeur des universités, Université François Rabelais, Tours,
- Stéphanie PORCHY-SIMON, Directrice de thèse, Professeure des universités, Université Jean Moulin Lyon 3.

Président du jury : Patrice JOURDAIN

Equipe d'accueil : Équipe Louis Josserand

Décision : Admis