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GONZALEZ BESTEIRO Ana
L'eau qui fait conflit, le conflit qui fait ressource. Recherche qualitative autour des discours sur l'eau dans des espaces protégés de l'Alto-Guadiana (Espagne) et de l'Usumacinta (Mexique)
Publié le 26 janvier 2021 – Mis à jour le 1 juillet 2021
Thèse en Sciences sociales, soutenue le 24 janvier 2020.
Face à la présence de conflits endémiques liés à l’eau, souvent sous-jacents mais qui perdurent des années et semblent devenus constitutifs de certains territoires, il paraît nécessaire de s’interroger sur le regard porté sur ces conflits par ceux-là mêmes qui en sont les témoins et acteurs. Le recul du temps met en évidence les incohérences entre les discours alarmistes sur les problèmes, les promesses de solutions et la relative inefficacité des mesures prises. Ceci suggère que le conflit, au-delà des tensions permanentes ou sporadiques qu’il impose au territoire, a une productivité qui pourrait justifier sa pérennisation.
Cette thèse revisite un conflit vieux de 40 ans dans le bassin du Alto-Guadiana (Espagne) à partir d’une posture constructiviste réflexive et néo-matérialiste s’appuyant sur les méthodes de la political ecology qui sont discutées dans la thèse. Son objectif est double : trouver un terrain d’entente méthodologique face aux réticences de la science quantitative vis à vis des méthodes qualitatives ; en démontrer l’utilité et l’efficacité en établissant des connexions inédites qui échappent habituellement au regard conscient des acteurs territoriaux, y compris ceux de la communauté techno-scientifique de l’eau, qui participe au même titre que les autres acteurs à la dynamique de la situation conflictuelle.
Le fonctionnement du conflit au sein des espaces naturels protégés de ce bassin espagnol et ceux, en écho, de l’Usumacinta au Mexique a été ainsi décrypté à l’aide des techniques qualitatives et inductives issues de la Méthode de la Théorie Enracinée à partir d’un corpus constitué d’entretiens semi-directifs et d’observations directes. Les protocoles de recueil et d’assemblage de données et les opérations et mécanismes d’extraction de sens effectués sont décrits pas à pas pour garantir la transparence de la démarche dans un exercice de crédibilité scientifique à l’instar des pratiques des sciences naturelles.
La fonction du conflit est discutée en quatre parties. La première explicite les éléments théoriques qui font de l’eau un objet de conflit environnemental en s’interrogeant sur le rôle de la production des données sur l’eau et les représentations sociales dans la recherche de solutions. La deuxième est consacrée aux méthodes de recueil des données de terrain et d’analyse des discours territorialisés sur le conflit lié à l’eau. La troisième partie, situe le contexte géo-social et politique des deux territoires à l’étude et souligne la différence des regards entre espaces vécus et espaces protégés. Enfin, la dernière partie détaille les résultats de l’analyse des données ancrées dans le matériau empirique collecté. Elle met en évidence les mécanismes par lesquels le conflit devient une ressource et l’intérêt de sa pérennisation pour les acteurs du territoire.
Le décalage entre ce qui se dit et ce qui se vit, les différences de qualification du conflit entre la communauté de la connaissance de l’eau et les autres acteurs du territoire traduisent des réalités d’un autre ordre, rivalités des pouvoirs territoriaux ou clivages sociaux. Ces éléments mettent aussi en évidence les mécanismes de la transformation du conflit en ressource, par la dynamique positive de l’échec des solutions proposées et par les avantages que la perpétuation du conflit procure à l’ensemble de la société concernée, ce qui permet d’élaborer un modèle théorique ancré conflit-ressource.
Dans cette perspective, le rôle de ce travail de recherche n’est certainement pas d’accompagner des solutions pré-établies ou de proposer des solutions nouvelles, mais plutôt de permettre aux acteurs concernés par la situation conflictuelle de se regarder dans un miroir, celui de leurs propres discours et représentations, pour changer de trajectoire si tel est leur choix et de prendre en toute connaissance de cause les décisions qui leur appartiennent.
Cette thèse revisite un conflit vieux de 40 ans dans le bassin du Alto-Guadiana (Espagne) à partir d’une posture constructiviste réflexive et néo-matérialiste s’appuyant sur les méthodes de la political ecology qui sont discutées dans la thèse. Son objectif est double : trouver un terrain d’entente méthodologique face aux réticences de la science quantitative vis à vis des méthodes qualitatives ; en démontrer l’utilité et l’efficacité en établissant des connexions inédites qui échappent habituellement au regard conscient des acteurs territoriaux, y compris ceux de la communauté techno-scientifique de l’eau, qui participe au même titre que les autres acteurs à la dynamique de la situation conflictuelle.
Le fonctionnement du conflit au sein des espaces naturels protégés de ce bassin espagnol et ceux, en écho, de l’Usumacinta au Mexique a été ainsi décrypté à l’aide des techniques qualitatives et inductives issues de la Méthode de la Théorie Enracinée à partir d’un corpus constitué d’entretiens semi-directifs et d’observations directes. Les protocoles de recueil et d’assemblage de données et les opérations et mécanismes d’extraction de sens effectués sont décrits pas à pas pour garantir la transparence de la démarche dans un exercice de crédibilité scientifique à l’instar des pratiques des sciences naturelles.
La fonction du conflit est discutée en quatre parties. La première explicite les éléments théoriques qui font de l’eau un objet de conflit environnemental en s’interrogeant sur le rôle de la production des données sur l’eau et les représentations sociales dans la recherche de solutions. La deuxième est consacrée aux méthodes de recueil des données de terrain et d’analyse des discours territorialisés sur le conflit lié à l’eau. La troisième partie, situe le contexte géo-social et politique des deux territoires à l’étude et souligne la différence des regards entre espaces vécus et espaces protégés. Enfin, la dernière partie détaille les résultats de l’analyse des données ancrées dans le matériau empirique collecté. Elle met en évidence les mécanismes par lesquels le conflit devient une ressource et l’intérêt de sa pérennisation pour les acteurs du territoire.
Le décalage entre ce qui se dit et ce qui se vit, les différences de qualification du conflit entre la communauté de la connaissance de l’eau et les autres acteurs du territoire traduisent des réalités d’un autre ordre, rivalités des pouvoirs territoriaux ou clivages sociaux. Ces éléments mettent aussi en évidence les mécanismes de la transformation du conflit en ressource, par la dynamique positive de l’échec des solutions proposées et par les avantages que la perpétuation du conflit procure à l’ensemble de la société concernée, ce qui permet d’élaborer un modèle théorique ancré conflit-ressource.
Dans cette perspective, le rôle de ce travail de recherche n’est certainement pas d’accompagner des solutions pré-établies ou de proposer des solutions nouvelles, mais plutôt de permettre aux acteurs concernés par la situation conflictuelle de se regarder dans un miroir, celui de leurs propres discours et représentations, pour changer de trajectoire si tel est leur choix et de prendre en toute connaissance de cause les décisions qui leur appartiennent.
Mots-clés : conflit, eau, ressource, discours, political ecology, méthode de la théorie enracinée, Alto-Guadiana, Usumacinta.
To cope with endemic water conflicts, which are often underlying but persist for years and seem to have become constitutive of certain territories, it appears that thought should be given to the way these conflicts are perceived by their own witnesses and actors. Hindsight evidences the inconsistencies between alarmist discourses on the problems, the promises to solve them, and the relative inefficiency of applied measures. This suggests that conflicts might have benefits that could explain their perpetuation, without regard to any permanent or occasional tensions that they eventually impose on the territory.
This thesis reviews a 40-year-old conflict in the Alto-Guadiana river catchment (central-south Spain) from the point of view of reflexive and neo-materialist constructivism, and it is based on the political ecology methods that are discussed in the thesis. Its aim is twofold: i) to reach a middle ground on methodological issues to cope with reluctance of quantitative sciences against qualitative techniques, and ii) to demonstrate its usefulness and effectiveness by establishing new connections that usually escape the conscious gaze of territorial actors, including those of the techno-scientific water community, which participate on the same basis as other actors in the conflict situation dynamics.
The functioning of the conflict within the protected natural areas of this Spanish river catchment and its replicate of Usumacinta in Mexico has thus been discovered using Grounded Theory qualitative and inductive techniques, by means of semi-structured interviews and direct observations. Both protocols for data collection and assembly and tools to extract meaning from transcriptions are described step by step, in order to ensure transparency and scientific reliability of the process, in the manner of natural sciences.
The function of the conflict is discussed in four parts. The first one deals with the role of water data production and social representations in the search for solutions, in order to reveal the theoretical elements that make water an object of environmental conflict. The second part is devoted to the method of collecting field data and analyzing territorialized discourses on the water-related conflict. Thirdly, geosocial and political contexts of study areas are defined, and differences in perception between natural reserves and inhabited areas are underlined. The last part details the results of Grounded Theory analysis from collected empirical data. It highlights the mechanisms that drive the conflict to become a resource and the interest of territorial actors on its perpetuation.
The gap between what is said and what is happening, i.e. the differences in conflict qualification between water knowledge community and other territorial actors, reflects realities of distinct nature, namely rivalries among territorial powers or social cleavage. These elements also highlight the mechanisms of conflict transformation into a resource, through the positive dynamics of the failure of proposed solutions and the benefits that conflict perpetuation brings to the whole society, which allows the development of an anchored conflict-resource Grounded Theory model.
From this perspective, the purpose of this research work is certainly not to support pre-established solutions or to propose new ones, but rather to enable the actors concerned by the situation to look at themselves in a mirror, i.e. that of their own speeches and representations, in order to change their trajectory, if that is their choice, and to take knowingly the decisions that correspond to them.
Keywords : conflict, water, resource, discourse, political ecology, grounded theory approach, Alto-Guadiana, Usumacinta.
Directeur(trice) de thèse : Anne HONEGGER
Membres du jury :
- Mme Anne HONEGGER, Directrice de thèse, Directrice de recherche CNRS habilitée à diriger des recherches, Ecole Normale Supérieure de Lyon,
- M. Patrice MELÉ, Professeur des université, Université de Tours,
- M. Stéphane GHIOTTI, Chargé de Recherche CNRS habilité à diriger des recherches, Université de Montpellier,
- Mme Isabelle MICHALLET, Maître de conférences habilitée à diriger des recherches, Université Jean Moulin Lyon 3.
- Mme Sara FERNANDEZ, Ingénieure-chercheuse des Ponts, des Eaux et des Forêts, ICPEF, Strasbourg,
- Mme Lucia DE STEFANO, Professeure associée, Universidad Complutense, Madrid, Espagne.
Président(e) du jury : Patrice MELÉ
Documentation
Mise à jour : 1 juillet 2021