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CAISERMAN Arnaud

Adapter les stratégies agricoles aux évolutions socio-économiques et climatiques en milieu méditerranéen : comparaison de l'usage de l'eau et des choix de plantes des agriculteurs dans la plaine de la Békaa (Liban) et de Marvdasht (Iran)

Publié le 13 février 2020 Mis à jour le 11 mars 2021

Thèse en Géographie- Aménagement, soutenue le 7 février 2020.

:  D’après la carte des climats de Köppen, le climat méditerranéen semi-aride est présent dans plusieurs pays du Moyen-Orient, dont le Liban et l’Iran. Dans la perspective d’une régionalisation de la compréhension du défi de l'eau, deux plaines agricoles aux caractéristiques climatiques similaires ont été retenues comme zones d’étude : la plaine de la Békaa au Liban et la plaine de Marvdahst en Iran. La plaine de Marvdasht est légèrement plus aride. Avec le changement climatique, la Békaa ressemblera avant 2100 à la plaine de Marvdasht d’aujourd’hui. Il s’agit donc de connaitre les pratiques agricoles dans la plaine de Marvdasht pour imaginer ce à quoi ressemblera l’agriculture de la Békaa à l’avenir. Les agriculteurs doivent adapter leurs stratégies autant à la variabilité interannuelle des précipitations et aux sècheresses qu’aux incertitudes économiques (variabilité des prix de vente). Malgré des différences (géo)politiques certaines, les agriculteurs de la Békaa et de Marvdasht choisissent des plantes qui ont des besoins en eau trop importants par rapport à la ressource en eau renouvelable, mais qu’ils peuvent vendre au prix fort sur le marché. En définitive, les bilans hydriques des années étudiées sont négatifs : à Marvdasht les agriculteurs ont pompé 0,25 km3 d’eau souterraine pour satisfaire les besoins totaux en irrigation mais la recharge des nappes n’a été que de 0,09 km3 cette année-là. Dans la Békaa, cet équilibre est aussi négatif, mais dans des proportions moins importantes : 0,15 km3 ont été pompés pour une recharge de 0,1 km3. Les besoins en irrigation sont donc supérieurs à l’eau renouvelable. Les agriculteurs ont pris le parti de privilégier l’adaptation au marché plutôt qu’à la gestion durable des ressources. Les raisons des choix de cultures ont été analysées de près à travers des enquêtes sur le terrain mais aussi certaines méthodes de télédétection pour établir des cartes de cultures. Les besoins en irrigation des plantes sont aussi estimés par télédétection car ils permettent de déterminer si les agriculteurs favorisent ou non des stratégies d’adaptation au changement climatique avec des choix de cultures pertinents. Ce déséquilibre provient du productivisme adopté dans les années 50 mais aussi d’un objectif politique beaucoup plus ambitieux, l’autosuffisance alimentaire, surtout en Iran. Cela provoque une surexploitation des eaux souterraines pour l’irrigation et ainsi un rabattement des nappes de plusieurs dizaines de mètres depuis les années 80. Des alternatives consistent à cultiver des plantes à forte valeur ajoutée et aux besoins en eau modestes : le safran, le colza, le quinoa et le cannabis (au Liban). Nous avons mis en valeur ces cultures alternatives car elles permettraient de réaliser l’économie de millions de m3 chaque année. Encore peu cultivées, ces plantes ont besoin de marchés incitatifs pour susciter l’intérêt des acteurs de l’agriculture. Cette partie opérationnelle analyse les raisons de ce succès mitigé en vue de trouver des marchés locaux incitatifs qui seraient au service d’une politique agricole durable plus efficace que les mesures restrictives sur la gestion de l’eau (souvent contournées par les agriculteurs).

According to Köppen’s climate map, the semi-arid Mediterranean climate covers several countries in this region, including Lebanon and Iran. In order to regionalize the understanding of the water challenge of this region, two agricultural plains with similar characteristics were selected as study areas: the Bekaa plain in Lebanon and the Marvdahst plain in Iran. The Marvdasht plain is slightly drier and through climate change, the Bekaa plain will look like the present climate conditions of Marvdasht before 2100. It is therefore necessary to grasp the agricultural practices in the Marvdasht plain in order to imagine how Bekaa agriculture will look like in the future. Farmers must adapt their strategies to the local climate that is characterized by strong uncertainties (interannual variability of rainfall or frequent droughts) but also to economic uncertainties (prices’ variability). Despite (geo)political differences, some farmers in the Bekaa and Marvdasht have chosen strong water demanding crops, compared to the local renewable water resources. However, these crops are profitable on the market. In total, the water balances for the years under consideration are negative: in Marvdasht, farmers pumped 0,25 km3 of groundwater to meet the total irrigation needs, but the groundwater recharge was only 0,09 km3 in that year. In the Bekaa, this balance is also negative, but to a lesser extent: 0,15 km3 were pumped for a recharge of 0,1 km3. In both cases, irrigation needs are therefore higher than renewable water. They have therefore promoted market adaptation rather than sustainable resource management. Thus, the reasons for crop choices were closely analysed through field surveys and certain remote sensing methods to generate crop maps. The net irrigation requirements of crops are also estimated through remote sensing. Indeed, water needs determine whether or not farmers promote climate change adaptation strategies with relevant crop choices. This regional imbalance at the expense of resources stems from the productivism in the early 1950s. This paradigm is rooted on farm’s profitability and a more ambitious political objective, food self-sufficiency, especially in Iran. This causes an overexploitation of groundwater for irrigation and thus a lowering of groundwater by several tens of meters since the 1980s. Some alternatives consist of growing plants with high added value and modest water requirements: saffron, canola, quinoa and cannabis (in Lebanon). We have highlighted these alternative crops since their cultivation on large areas could save millions of water cubic meters each year. Still not widely cultivated, these plants need incentive markets to attract the interest of agricultural stakeholders. This operational part thus analyses the reasons for this lukewarm success in order to find incentive markets. Such local markets would strengthen a more sustainable agricultural policy than restrictive measures on water management that farmers always manage to circumvent.

Mots-clés : agriculture ; irrigation ; Iran ; Liban ; Moyen-Orient ; sècheresses ; changement climatique ; adaptation ; marché ; ressources ; sociologie rurale ; télédétection ; évapotranspiration ; politiques ; gestion

Keywords : agriculture; irrigation; Iran; Lebanon; Middle East; droughts; climate change; adaptation; market; resources; rural sociology; remote sensing; evapotranspiration; politics; management

Directeur(trice) de thèse : Dominique DUMAS

Membres du jury :
- M. Dominique DUMAS, Directeur de thèse, Professeur des universités, Université Jean Moulin Lyon 3,
- Mme Karine BENNAFLA, Co-Directrice de thèse, Professeure des université, Université Jean Moulin Lyon 3,
- M. David BLANCHON, Professeur des université, Université de Paris Nanterre,
- Mme Nancy MESCHINET DE RICHEMOND, Professeur des universités, Université de Montpellier III,
- M. Bernard HOURCADE, Directeur de recherche émérite, CNRS laboratoire Mondes iranien et indien, Paris Villejuif, Ivry sur Seine,
- Mme Anne HONNEGER, Directrice de recherche, CNRS laboratoire Environnement, ville et société, ENS Lyon,
- M. Faour GHALEB, Director of the National Center of Remote Sensing, at the National Council for Scientific Research of Lebanon, Beyrout, Liban.

Président(e) du jury : Bernard HOURCADE