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BAKI-MIGNOT Xavier
La vacance. Principes d'une théorie générale de la propriété
Thèse en Droit, soutenue le 19/06/2025.
La science juridique est persuadée que la propriété une fois acquise n’a nul besoin pour se survivre d’être ratifiée par l’usage ; quitte à prétendre, sans craindre la contradiction, que « c’est encore user de la chose que de n’en pas user ». Cette grave erreur obère à la racine toute compréhension théorique de la propriété. La puissance du dogme a empêché de voir que le droit positif lui apporte partout des démentis répétés. L’observation montre en effet que la propriété, étant une charge pour le corps social qu’elle dépouille, s’effondre aussitôt qu’elle n’est plus soutenue par l’usage en vue duquel a été consenti le sacrifice collectif. La vacance est l’état pathologique du droit réel devenu vide par l’effet d’une situation de non-usage structurel. Elle provoque, selon qu’elle est réversible ou irréversible, l’affaiblissement ou l’anéantissement du droit réel. La libération de la chose permet alors d’en redistribuer les utilités au sein du corps social, sous réserve d’une éventuelle réversion au maître. La révélation de cette logique interne conduit à reconstruire toute la théorie de la propriété. Le mécanisme de la vacance, inhérent à la propriété, permet en premier lieu d’en déterminer exactement le domaine. Cette ordalie aboutit d’une part à rejeter toutes les choses incorporelles, d’autre part à admettre le corps humain, la corporéité s’imposant ainsi comme l’invariant de la propriété par-delà la diversité des choses qu’elle peut atteindre. Plus avant, c’est la structure même de la propriété que commande de repenser la découverte de la vacance. L’arrière-droit du corps social aux choses vacantes ayant révélé en négatif son état de servitude constitutif de tous les droits réels, c’est bien dans le rapport à l’extériorité que de tels droits se livrent ontologiquement ; rapport non pas obligationnel, mais réel. La propriété est un jus in re mais ce droit purement répulsif ne porte que sur les choses extérieures et au premier chef sur le corps même des tiers ; la propriété apparaît alors fondamentalement comme un jus repellendi, un droit de ban dont la violence intrinsèque ne se justifie que par l’usage qu’elle doit permettre. Il s’ensuit que les sûretés réelles, étrangères à tout usage de la chose, ne peuvent être des droits réels : en elles se rencontrent en vérité la technique des obligations et la technique du patrimoine sécuritaire, créé ad hoc pour recevoir quelque actif distrait du patrimoine inné de la personne.
Mots-clés : Vacance ; Propriété ; Biens ; Non-usage ; Corps humain ; Sûretés réelles
Legal scientists commonly believe that ownership, once acquired, requires no further ratification through effective use in order to sustain itself as such—going so far as to claim, heedless of the contradiction, that "not using one’s property is just another way of using it". That mistake undermines any theoretical understanding of ownership. Positive law consistently proves that assumption wrong. Because property puts a heavy burden on the public it deprives, property is doomed to collapse when it is no longer supported by effective use, i.e. by the very purpose of the common sacrifice made in the first place. Vacancy is the pathological state of property become void due to structural lack of use. Depending on whether it is reversible or irreversible, vacancy causes either the weakening or the utter annihilation of ownership, allowing at any rate redistribution of the thing to the public, subject to potential reversion to the original owner. That logic being revealed, the whole theory of ownership demands reconstruction. Since the system of vacancy is inherent to ownership, it allows first of all a precise determination of the scope of property. This unprecedented ordeal leads, on the one hand, to the rejection of all incorporeal things, on the other hand, to the admission of the human body. Corporeality thus comes out as the invariant of ownership above the diversity of all objects it may encompass. Furthermore, our discovery propels fundamental rethinking about the very structure of ownership. The public’s latent right over vacant things showed how rights on res are essentially enslaving; it follows those rights are indeed to be found in the relationship to the outer world. That relationship has nothing to do with obligations; it is a relationship to res. I argue that ownership, though a jus in re, applies in fact to external things, chiefly to the very body of people. Ownership is a jus repellendi, a right of banishment, the intrinsic violence whereof only effective use can justify. Hence real securities, being unrelated to the use of property, are no such rights; rather, they result from the intertwining of obligations and the technique of security universitas, specifically created to receive assets diverted from the person’s innate patrimony.
Keywords : Vacancy ; Property law ; Jus in re ; Lack of use ; Human body ; Real securities
Direction de thèse : M. William DROSS
Membres du jury :
- M. William DROSS, Professeur des universités, université Jean Moulin Lyon 3 - directeur de thèse
- M. Rémy CABRILLAC, Professeur des universités, université de Montpellier - rapporteur
- Mme Aude DENIZOT, Professeur des universités, Le Mans université - rapporteur
- M. François CHÉNEDÉ, Professeur des universités, université Jean Moulin Lyon 3 - examinateur
- Mme Muriel FABRE-MAGNAN, Professeur des universités, université Paris I Panthéon-Sorbonne - examinatrice
- M. Frédéric ZENATI-CASTAING, Professeur des universités émérite, université Jean Moulin Lyon 3 - président
Présidence du jury : M. ZENATI-CASTAING Frédéric