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ALLOUI Solène

L’office du juge en droit privé des contrats. Etude comparative de droit français et de droit anglais

Publié le 28 février 2024 Mis à jour le 19 juin 2024

Thèse en Droit, soutenue le 6 novembre 2023.

Les systèmes juridiques de tradition civiliste et les systèmes de common law sont souvent perçus comme foncièrement opposés. Cette antinomie semble se vérifier lorsque l’on observe le droit français, droit emblématique de la tradition civiliste, et le droit anglais, droit emblématique de la tradition de common law. Le droit français et le droit anglais présentent en effet des différences notables qui ont trait à l’organisation judiciaire, à la création du droit, au contenu de celui-ci, et à sa mise en œuvre par les juridictions. Toutefois, ils présentent également des similitudes non négligeables. C’est le cas notamment en matière contractuelle : le droit français des contrats comme le droit anglais des contrats se sont historiquement articulés autour d’un principe de respect du contrat, nommé en droit français « la force obligatoire du contrat », consacré tant par le Code civil français que par les précédents anglais. Ce principe de force contraignante du contrat s’impose au juge français comme au juge anglais. Par conséquent, les juges ne peuvent en principe pas porter atteinte au contrat, en procédant à son anéantissement ou à sa réécriture.
Cependant, l’étude des lois en vigueur en France et en Angleterre, ainsi que des décisions de justice rendues par les tribunaux permet de découvrir une tout autre réalité. L’analyse du droit positif montre que les juges français et les juges anglais disposent de nombreux outils pour intervenir sur le contrat, à la demande d’une ou des parties, en procédant à sa révision ou à son anéantissement, rétroactif ou pour l’avenir. Plus précisément, le juge intervient dans la sphère contractuelle au nom de la sécurité contractuelle, dans une conception relativement classique du contrat, et au nom de la justice contractuelle, dans une conception renouvelée du contrat.
Les mécanismes qui permettent au juge d’intervenir dans le contrat sont multiples et très variés. Ils donnent à voir les contours de l’office du juge en matière contractuelle. La comparaison entre deux systèmes de traditions juridiques profondément différentes révèle ainsi une évolution très inégale du principe, initialement commun, de « la force obligatoire du contrat », et du positionnement du juge par rapport à ce principe. La comparaison met au jour la transformation qu’a connu la notion juridique de contrat en droit français, ainsi que l’importante mutation qu’a connu l’office du juge français sur les dernières décennies.

Mots-clés : Droit des contrats, contrat, juge, office du juge, procédure civile, droit comparé.

Legal systems based on the civil law tradition and those based on the common law tradition are often perceived as being fundamentally opposed. This contradiction seems confirmed when we look at French law, which is emblematic of the civil law tradition, and English law, which is emblematic of the common law tradition. French law and English law show significant differences in terms of judicial organisation, law-making processes, the contents of the law and its implementation by the courts. However, they also have significant similarities. This is particularly the case in contractual matters. French contract law and English contract law are historically based on a principle of compliance with the contract, referred to in French law as “the binding force of the contract”. This principle is enshrined in both the French Civil Code and English precedents and is binding on both the French judge and the English judge. As a result, judges cannot, in principle, undermine the contract by annulling it or rewriting it.
However, a study of currently applicable laws in France and in England, as well as the decisions handed down by courts, unveils a completely different reality. An analysis of positive law shows that French and English judges have many tools at their disposal to intervene in the contract, at the request of one or both parties, by revising or annulling it, retroactively or for the future. More precisely, the courts intervene in the contractual sphere in the name of contractual certainty, in a relatively classical conception of the contract, and in the name of contractual justice, in a renewed conception of the contract.
The legal mechanisms that enable judges to interfere in contracts are many and varied. They reveal the outlines of the judge's role in contractual matters. A comparison between two systems with profoundly different legal traditions reveals a very uneven development of the principle of “the binding force of the contract” which was initially shared by both systems. It also reveals the very uneven development of the position of the courts in relation to that principle. The comparison highlights the transformation undergone by the legal concept of contract in French law, as well as the major changes in the role of the French judge in the last decades.

Keywords: Contract law, contract, judge, judge’s role, civil procedure, comparative law.


Directrice de thèse : Frédérique FERRAND

Membres du jury :
  • Mme FERRAND Frédérique, Directrice de thèse, Professeure des universités, Université Jean Moulin Lyon 3, France,
  • Mme CATTALANO Garance, Rapporteure, Professeure des universités, Université Paris 8, France,
  • Mme ROWAN Solène, Rapporteure, Professeure, King's College London, Royaume-Uni,
  • M. CADIET Loïc, Professeur des universités, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, France,
  • M. CHÉNEDÉ François, Professeur des universités, Université Jean Moulin Lyon 3, France.

Président du jury : Loïc CADIET