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LHADI Jérémy

L'influence des normes européennes sur la procédure civile d'appel avec représentation obligatoires

Publié le 16 juillet 2020 Mis à jour le 16 juillet 2020

Thèse en Droit, soutenue le 10 décembre 2019.

Les normes européennes, qu'elles émanent de l'Union Européenne ou découlent de la Convention Européenne des droits de l'Homme, telle qu'interprétée par la Cour EDH, ont un impact sur l'ensemble de l'ordre juridique étatique des États concernés.
Parmi les matières irradiées par le droit européen au sens large, la procédure civile ne fait pas exception mais la matière processuelle demeure traitée de façon singulière par les institutions supra-nationale, à plus forte raison pour la procédure suivie devant les juridictions de recours.
Si à raison des ordres juridiques, les normes européennes à valeur supérieure à la loi ont nécessairement une influence sur la procédure civile d'appel, ce n'est qu'en raison de la volonté des autorités françaises que cette influence trouve une réalisation concrète. En effet, au cours de l'adoption de la réforme de la procédure civile d'appel, en 2009, le pouvoir règlementaire a exprimé le souhait d'adopter une procédure d'appel conforme aux exigences européennes du procès civil, en particulier de l'article 6§1 de la Convention EDH et du principe du procès équitable.
autant, si cette influence est incontestable, elle se trouve limitée à divers égards. D'une part, l'autonomie procédurale des États a été fermement consacrée par les autorités de l'Union qui ne s'est attribué aucune compétence en la matière, et la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union. De son côté, la Cour EDH limite son immixtion à cet égard au nom de principe de subsidiarité renforcé par l'adoption des Protocoles additionnels n°15 et 16. Encore, à plus forte raison, le choix du pouvoir règlementaire français, marqué du sceau de la célérité, s'est effectué au détriment certain des autres principes directeurs du procès, en particulier le procès équitable et l'accès au juge, qui se trouvent excessivement amputés par des délais stricts et des sanctions sévères et automatiques. La procédure civile d'appel est devenu une procédure essentiellement calendaire, de gestion de flux contentieux, sans atteindre l'objectif de célérité qui justifiait ces restrictions.
Ainsi, au regard des difficultés de délai que connaissent les cour d'appel françaises, il convient de s'interroger sur l'opportunité de consacrer plus largement et de façon effective, les principes européens du procès civil, par l'avénement d'un appel nouveau qui aurait pour objet la remise au cœur de l'équité, du principe du contradictoire, de l'égalité des armes et de l'accès au juge.
Pour ce faire, il est possible de se tourner vers les modèles procéduraux des instances judiciaires des institutions européennes, ou encore des exemples procéduraux étrangers. Une telle démarche de rééquilibrage des attentes procédurales permettrait intrinsèquement d'opter pour une procédure plus vertueuse et respectueuse des droits procéduraux des justiciables, et sans doute également, d'améliorer les délais de procédure devant les cours d'appel.
Dans une telle perspective, il convient de s'interroger sur l'appel dans sa globalité, mais également sur l'intégralité du procès civil. Quant à la philosophie de l'appel, il semble que la voie d'achèvement soit le meilleur modèle afin d'atteindre ces objectifs, dans un cadre strict qui permette d'exclure les abus et la déloyauté des parties. Ainsi, par différents mécanismes de filtrage et l'adoption d'une instruction plus souple, il serait possible de concilier les exigences du procès équitable et de la célérité, ouvrant la voie d'une influence totale des normes européennes sur la procédure civile d'appel avec représentation obligatoire.

European norms, whether they emanate from the European Union or derive from the European Convention on Human Rights, as interpreted by the EDH Court, have an impact on the entire state legal order of the States concerned.
Of the materials irradiated by European law in the broad sense, civil procedure is no exception, but procedure remains treated in a singular way by both European institutions, even more concerning appeal courts.
If, by reason of the legal systems, European norms with a higher value than the law necessarily have an influence on the civil appeal procedure, it is only because of the will of the French authorities that this influence finds concrete realization. Indeed, during the adoption of the reform of the civil appeal procedure in 2009, the regulatory authority expressed the wish to adopt an appeal procedure that complies with the European requirements of the civil trial, in particular Article 6§1 of the EDH Convention and the principle of fair trial.
However, while this influence is indisputable, it is limited in various respects. On the one hand, the procedural autonomy of States has been firmly enshrined by the authorities of the Union, which has not given itself any competence in the matter, and the jurisprudence of the Court of Justice of the Union.
For its part, the EDH Court limits its interference in this respect in the name of the principle of subsidiarity reinforced by the adoption of Additional Protocols Nos 15 and 16. Even more so, the choice of French executive power, marked by the seal of celerity, was made at the expense of certain of the other guiding principles of the trial, in particular the fair trial and access to the judge, which find themselves excessively cut off by strict deadlines and strict and automatic penalties. The civil appeal procedure has become essentially a calendar procedure for managing litigation flows, without achieving the objective of celerity that justified these restrictions.
Thus, in view of the difficulties of delay experienced by the French Courts of Appeal, it is necessary to consider the advisability of devoting more broadly and effectively the European principles of civil litigation, by the advent of a new appeal that would have as its object put in center fairness, the principle of the contradictory, the equality of arms and access to the judge.
To do this, it is possible to turn to the procedural models of the judicial bodies of the European institutions, or even to foreign procedural examples. Such an approach to rebalancing procedural expectations would make it possible to opt for a more virtuous procedure that respects the procedural rights of litigants, and probably also, to improve the time it takes in front of appeal courts.
In this perspective, it is necessary to question the appeal in its entirety, but also the totality of the civil process. As for the philosophy of the appeal, it seems that the « way of completion » is the best model in order to achieve these objectives, within a strict framework that makes it possible to exclude abuses and disloyalty of the parties. Thus, through different filtering mechanisms and the adoption of a more flexible instruction, it would be possible to reconcile the requirements of fair trial and expediency, opening the way for a total influence of European standards on the civil procedure of appeal with compulsory representation.

Mots-clés : Union Européenne, Convention Européenne des Droits de l'Homme, procédure d'appel, représentation obligatoire, procès équitable, accès au juge.

Keywords : European Union, Convention for the Protection of Human Rights and Fundamental Freedoms, European Court of Human rights, appeal procedure, access to the judge, fair trial.

Directeur(trice) de thèse : Cyril NOURISSAT

Membres du jury :
- M. Cyril NOURISSAT, Directeur de thèse, Professeur des universités, Université Jean Moulin Lyon 3,
- Mme Corinne BLERY, Professeure des universités, Université Valenciennes,
- M. Rudy LAHER, Professeur des universités, Université de Limoges,
- M. Hervé CROZE, Professeur des universités, Université Jean Moulin Lyon 3,
- M. Edouard DE LEIRIS, Conseiller référendaire à la Cour de cassation, Paris.


Président(e) du jury : Hervé CROZE